Jouer à aider : l’intériorisation des dispositions genrées à aider pendant l’enfance

Juliette Grisoni

Article complet du #94 | L’aide au prisme des âges de la vie

FR : La perception des enfants comme des individus uniquement receveur∙ses de soin a conduit les enquêtes sociologiques à mettre de côté l’analyse de leurs comportements d’aidant∙es. L’apprentissage de l’entraide est pourtant l’un des objectifs de l’école maternelle, qui présuppose alors une socialisation à l’aide dès la petite enfance. À partir d’observations ethnographiques réalisées dans une école maternelle parisienne, cet article s’attache à décrire les mécanismes de socialisation par lesquels les filles intériorisent des dispositions à aider dans le cadre scolaire. Plus particulièrement, il s’agit d’analyser les pratiques ludiques genrées des enfants comme des vecteurs de socialisation à l’aide par l’incarnation des rôles d’« aidés » pour les garçons et d’« aidantes » pour les filles. Les modalités spécifiques des jeux d’imitation pratiqués par les filles conduisent ces dernières à adopter des pratiques d’aide inspirées des figures de la « maman » et de la « maîtresse », qu’elles transposent progressivement au cadre du non-jeu. Ce type de comportements est alors valorisé par les adultes de l’école, incitant les filles à les reproduire quotidiennement dans leurs relations aux autres.

Mots clés : socialisation genrée, dispositions à aider, jeux d’imitation, école maternelle

EN: The perception of children only as care receivers has led sociological surveys to put aside the analysis of their helping behaviours. However, learning to help is one of the objectives of preschools, which then presupposes a socialisation to helping practices from early childhood. Based on ethnographic observations carried out in a Parisian preschool, this article aims to describe the mechanisms of socialisation by which girls internalize dispositions to help in school environment. More particularly, it analyses the gendered playful practices of children as vectors of socialisation to helping behaviours, through the incarnation of the roles of “cared-for” for boys and “carers” for girls. The specific modalities of pretend plays performed by girls lead them to adopt helping practices inspired by the figures of the “mother” and the “teacher”, which they gradually transpose to a non-play frame. This type of behaviour is then valued by adults at the school, encouraging girls to reproduce it in their daily relationships with others.

Keywords: gender socialisation, dispositions to help, pretend plays, preschools

Article complet du #94 | L’aide au prisme des âges de la vie