Aider un·e proche au temps des jeunesses, entre norme d’insouciance et devoir de solidarité familiale

Hélène Buisson-Fenet et Diane Béduchaud

Article complet du #94 | L’aide au prisme des âges de la vie

FR : La plupart des travaux portant sur les arrangements autour de l’aide intrafamiliale ont concerné les adultes à l’égard de leurs parents, en particulier en contexte de dépendance du grand âge. Toutefois, certains se sont penchés sur une aide plus méconnue, celle fournie par de jeunes aidant·es qui inversent la norme d’âge des solidarités privées. Issu d’une recherche doctorale en cours, cet article vise à examiner les spécificités de l’aide apportée aux barreaux les plus bas de l’échelle des âges, tout en mettant en évidence les logiques sociales des variations de cette aide. Que signifie « aider » un proche malade ou en situation de handicap au jeune âge, selon qu’on est enfant ou jeune adulte ? Nous aborderons d’emblée la diversité interne de la catégorie des « jeunes aidants », dont l’hétérogénéité des expériences confirme le caractère d’artefact. Nous montrerons ensuite qu’à l’âge des premières fois, les primes socialisations aux relations d’aide engagent une économie morale domestique reposant sur quelques principes invariants (comme la délimitation parentale de « l’aide abusive »), mais que tous les ménages ne définissent pas uniment « l’aide acceptable », et l’aide à un·e ascendant·e s’annonce le plus souvent plus exigeante que celle à un·e adelphe. Progressivement, les jeunes acquièrent des nouvelles responsabilités, dont certaines sont directement liées au passage de certains seuils d’âge, rendant possibles de nouvelles pratiques (conduite, emploi rémunéré). En outre, le travail d’aide intègre des activités hétérogènes de mise en relation avec l’extérieur du foyer, alourdissant la responsabilité légale du·de la jeune mais permettant aussi de décloisonner la prise en charge.

Mots clés : jeune aidant·e, aidant·e, proche aidant·e, aide familiale, travail domestique, travail émotionnel, jeunesse, enfance

EN: Most work dealing with arrangements around intrafamilial care has focused on adults providing care for their parents, particularly in the context of elderly dependency. However, some have focused on a lesser-known form of care, one provided by young carers who invert the age norm of private solidarities. This article, which stems from ongoing doctoral research, aims to examine the specific characteristics of the care provided at the lowest rungs of the age ladder, while highlighting the social logics of these variations. What does it mean to « care » for a sick or disabled relative at an early age, whether you are a child or a young adult ? We will start by looking at the internal diversity of the category of « young carers », whose heterogeneity of experiences provides a good account of the artefact. We will then show that, at the age of first-times, early socialization into caring relationships engages a household ethical code based on a few invariant principles (such as parental delimitation of « abusive care »), but that not all households uniformly define « acceptable care », and caring for an ascendant more often turns out to be more demanding than caring for a sibling. As they grow older, young people acquire new responsibilities, some of which are directly linked to the crossing of certain threshold ages, making new practices possible (driving, paid employment). In addition, the work they do as carers integrates a variety of activities involving contact with people outside the home, increasing the young person’s legal responsibilities but also enabling them to take a more decentralized approach to care.

Keywords: young carer, carer, family carer, domestic work, emotional work, youth, childhood

Article complet du #94 | L’aide au prisme des âges de la vie