#75 | LSP/RIAC : un demi-siècle de débats sociaux et politiques
Sommaire
Introduction
Présentation
Frédéric Lesemann, Claude Martin et Johanne Charbonneau
Thème 1 – Savoirs
Savoirs : présentation du thème
Renaud Crespin et Carole Clavier
Éducation populaire autonome et universités : une contradiction motrice?
Gaston Pineau
|
Résumé
L’Université est coupée de 90% de la population. À la frontière lointaine des universités et des milieux populaires, quelques universitaires et représentants des milieux populaires tentent de définir les modalités d’une intégration de leurs activités. Telle est la fonction de l’« atelier de promotion collective » de la Faculté d’Éducation permanente de l’Université de Montréal.
L’atelier tente de rejoindre les milieux populaires par une participation à leurs luttes tant en milieu syndical qu’en dehors des milieux de travail. Dans ces derniers, des interventions ont eu lieu dans les domaines de l’habitation, de la santé, de la défense des libertés.
L’article discute ensuite des rapports entre l’éducation populaire autonome, les intellectuels et les organisations.
Abstract
Universities are cut off from 90 p.c. of the population. On the fringe of their respective environments, a few university adminstrators and a few representatives of citizens groups are trying to find a way to work together. At least such is the goal of the Collective Advancement programme of the Continuing Education Faculty of the University of Montreal.
The programme seeks to establish a presence in the community by participating in struggles both through the union and outside the workplace. In the latter case, joint-action has been possible in the housing, health and civil-rights areas.
The article goes on to discuss the relationships between independent citizen education, intellectuals and institutions.
Recherche-action, ou connaissance pour l’action? Quelques points de repère et trois positions de principe
Robert Franck
|
Résumé
Il existe diverses manières de relier la recherche et l’action. On doit à ce propos poser au moins deux questions :
- À qui sert la recherche-action?
- Que devient le savoir dans la recherche-action?
Il faut commencer par envisager les allégeances du chercheur en vue de déterminer à quelles conditions les intérêts et les préoccupations du chercheur ne porteront pas préjudice à ceux qui ont affaire à lui. Il faut ensuite que s’établisse un rapport contractuel entre le chercheur et les gens auprès desquels est menée une recherche-action et que ces derniers puissent exercer un contrôle démocratique sur le déroulement de la recherche.
Action et recherche peuvent-elles fusionner ? Que devient alors le savoir ? Sans la constitution d’un savoir disposant d’une relative autonomie par rapport à chaque situation particulière, on se prive des armes de la critique que sont la raison et l’expérience. Ce sont là les repères contre l’arbitraire de la recherche et du chercheur.
Abstract
There are various ways to link research to action. We should ask ourselves at least two questions: (1) in whose interests is R-A? (2) What happens to knowledge produced by R-A?
One must begin by analysing the allegiances of the researcher in an attempt to determine on what conditions his own interests and concerns may come into conflict with those of the group with which he is working. Secondly, there must be some kind of a contractual relationship that can be democratically controlled.
Can action and research fuse together? What happens to the knowledge produced? Without a relatively independent status for knowledge, is there not a danger of losing the critical contribution of reason and experience? Without this contribution are we not in danger of reintroducing the arbitrary nature of the research and researcher back into the process of producing knowledge?
L’intervention sociologique
François Dubet et Michel Wieviorka
|
Résumé
Consacrée jusqu’ici à l’étude du mouvement contestataire, l’intervention sociologique prônée par Alain Touraine peut se décrire comme un processus qui, à partir de la mise en interrelation des chercheurs et des acteurs concernés aboutit à l’instauration d’un va-et-vient entre l’analyse et l’action, entre les chercheurs et les acteurs.
Les diverses composantes de ce type d’intervention sont présentées ici : nécessité d’une demande d’analyse par les acteurs, constitution de groupes d’analyse, mise en situation des acteurs en vue de créer les rapports sociaux, statuts et rôles des sociologues-chercheurs, phase de « sociologie permanente ».
L’intervention sociologique est organisée en fonction d’un objectif de connaissance et elle vise à comprendre comment se construisent l’action collective et les mouvements sociaux. Pour les militants, il apparaît que la connaissance des processus de formation de leur propre action leur est utile, d’autant qu’ils pensent que la lutte qu’ils mènent est centrale dans le type de société qui se construit sous leurs yeux et dont ils veulent être acteurs.
Abstract
Sociological intervention, a particular type of research-action which has been developed by Alain Touraine, has been widely used in working with protest movements. One can describe it as a process which is based upon the dynamic resolution of conflicts between researchers and activists, between analysis and action.
The various components of this type of intervention are presented here: the necessity for the intervention to be a response to a formal request by the group concerned, the definition of roles and the « permanent sociology » phase.
The sociological intervention is organized in function of a cognitive objective and seeks to understand how collective action and social movements are constructed. The ways in which action is constituted seems to be useful for the actors concerned especially in that they see their struggles as an important part of the process of social reconstruction.
Savoir scientifique, politiques gouvernementales et démocratie : survol des perspectives
Dorothy Nelkin
|
Résumé
L’effet du savoir scientifique sur un ensemble de valeurs, définies de façon plutôt vague, que l’on désigne sous le nom de « démocratie », continue de susciter des passions et des analyses, comme en témoignent les revendications populaires en faveur d’une plus grande participation de la population aux processus de prises de décision relatives aux dossiers scientifiques. De telles revendications soulignent l’importance du débat politique dans des domaines qui furent jusqu’ici réservés à la recherche scientifique.
Cependant, un débat éclairé ne peut avoir lieu que dans la mesure où les participants ont une certaine compétence dans le domaine technique, ne serait-ce que pour pouvoir évaluer les « impératifs techniques » des choix réels qui se posent. Le savoir scientifique — tout comme la terre, la force de travail et le capital — constitue une ressource, voire une marchandise. La possibilité d’utiliser et de contrôler cette ressource a des conséquences importantes sur la distribution du pouvoir politique dans les sociétés démocratiques.
Abstract
The effect of scientific knowledge on the vaguely defined set of values known as « democracy » is a matter of persistent concern. This is reflected in populist demands for greater public participation in major policy choices. Such demands underscore the need of political dialogue in areas formerly in the domaine of expertise. Informed dialogue however, and meaningful negotiation over policy choices require competence to deal with difficult technical information—if only to prevent such choices from being masked as technical imperatives. Scientific knowledge, like land, labour and capital, is a resource—indeed a commodity—and the ability to manipulate and control this resource has profound implications for the distribution of political power in democratic societies.
L’évaluation des soins holistiques
Odile Sévigny, Anne Quéniart, Abby Lippman, Salinda Hess et Patrick Chabot
|
Résumé
L’intégration des médecines alternatives au système officiel de soins représente un enjeu important. L’un des facteurs considérés par les autorités québécoises compétentes au moment de prendre une décision à cet égard sera sans aucun doute l’efficacité des médecines alternatives, c’est-à-dire leur capacité d’améliorer et de maintenir la santé de façon sûre. Ce texte décrit les étapes d’une recherche qui consistait à évaluer des articles sur l’efficacité de certains soins alternatifs, articles publiés en anglais ou en français depuis 1975. La sélection des articles et le choix et l’utilisation de la grille d’évaluation sont présentés de manière détaillée. En dernier lieu, la question de la fiabilité et de la validité des articles, qui est au coeur du débat sur l’efficacité thérapeutique des médecines alternatives, est analysée.
Abstract
The integration of alternative medicine into the official healthcare system is an important issue. One of the factors the Quebec authorities concerned will consider when a decision is made in this respect will undoubtedly be the effectiveness of alternative therapies, i.e. their capacity to improve and maintain health in a reliable fashion. This text describes the stages of the research carried out to evaluate articles, published in English or French since 1975, on the effectiveness of certain alternative care methods. The selection of the articles and the choice and use of the evaluation grid are presented in detail. Finally, the question of the credibility and validity of the articles, which is at the heart of the debate on the therapeutic effectiveness of alternative medicine, is analyzed.
Entre science et politique : les politiques du savoir dans le monde associatif
Yves Lochard et Maud Simonet-Cusset
|
Résumé
Depuis les années 1980, il est possible d’identifier un mouvement général du monde associatif vers la production de savoirs propres et une reconnaissance institutionnelle de cette contribution à l’observation sociale. L’analyse des discours et des pratiques des acteurs met en évidence une diversité de politiques des savoirs : des politiques qui se définissent dans un double rapport au monde scientifique d’une part, et à l’État de l’autre, et qui, dans leur diversité, sont traversées par une même tension : celle de la coexistence et de l’articulation d’une logique de l’action et d’une logique de la connaissance.
Abstract
Since the 1980s, the community sector has developed its own social knowledge and claimed recognition of this contribution to social analysis. An analysis of the discourses and practices of actors documents a wide range of political positions of the sector with respect to its double relationship: to scientists and to the state. In all cases there is a similar tension. Despite variety and the pressure for co-existence, there is a tension between the a logic of action and that of social knowledge.
Table ronde
Le rôle des fondations privées au Québec : un point de vue de l’intérieur
Thème 2 – État social et pauvreté
État social et pauvreté : présentation du thème
Sylvain Lefèvre et Nicolas Duvoux
|
Table ronde
Les « Illusions tranquilles » et le pouvoir local Résumé Le film Les Illusions tranquilles relate l’histoire d’une élection municipale dans un…
|
Les « Illusions tranquilles » et le pouvoir local
Résumé
Le film Les Illusions tranquilles relate l’histoire d’une élection municipale dans un village du Québec. L’élection oppose un notable traditionnel à un technocrate, maire sortant, futur perdant. Au-delà de cet événement, c’est toute une représentation de l’évolution sociale nationale qui est mise en scène : la « fin du règne des technocrates », le retour des forces de conservation. À partir du film, un débat s’amorce entre le réalisateur du film, un fonctionnaire, un politicologue, une sociologue et un urbaniste. Il permet la confrontation d’interprétations différentes non seulement de la conjoncture actuelle du pouvoir local mais aussi du sens de l’évolution des forces sociales et politiques depuis la Révolution tranquille. L’échec du maire technocrate n’est-elle que l’expression du rejet dont finit toujours par être victime tout groupe « étranger » qui s’installe dans une communauté locale ? Ou faut-il la rattacher à la crise économique qui aurait contribué à précipiter l’échec d’un projet de modernisation misant sur les politiques centralisatrices de l’État ? Mais cette opposition entre notables traditionnels symbolisant les forces de conservation et technocrates « étatistes » représentant les forces de changement, n’est-elle pas chose du passé ? Les planificateurs ont appris à composer davantage avec les forces du milieu et les élites traditionnelles sont sorties de leur immobilisme. Le milieu local et la société dans son ensemble ne sont donc pas dans cette impasse que présente le film. Par contre il faudra peut-être se faire à l’idée que le changement ne soit plus guidé par de grands projets de société.
Abstract
The film « Les Illusions tranquilles » (Quiet Illusions) relates the story of a municipal election in a Québec village. The mayoralty contest was between a member of the traditional local elite and the incumbent technocratic mayor. The latter lost. This film attempts to portray a new trend in municipal politics: the end of the technocratic era and the revival of conservative local elites.
This article summarizes a discussion held with the film director, a government technocrat, a political scientist, a sociologist and a professor of urban studies. The discussion centered around different interpretations not only of recent trends in municipal politics but more generally, the evolution of social and political forces since the Quiet Revolution of the 1960’s.
Was the failure of the technocratic mayor an expression of mistrust which all « outsiders » meet when they get involved in local politics? Or was it related to the economic crisis which seriously compromised the ambitious, centralizing reforms of the sixties and seventies? Perhaps this vision of a struggle between conservative local elites and progressive state technocrats is outdated. Government planners have learned how to work more closely with the community and traditional elites are no longer simply bastions of reaction. Things are perhaps not quite as hopeless as the film seems to suggest but it seems clear that the days of sweeping social reform are over.
Une forme mouvementée de gestion du social : les CLSC
Paul R. Bélanger et Benoit Lévesque
|
Résumé
La mise sur pied des centres locaux de services communautaires au début des années 1970 au Québec correspondait à une situation particulière de crise dont les composantes se sont profondément modifiées depuis. Afin de saisir les nouveaux enjeux auxquels sont dorénavant confrontés les CLSC, les auteurs se penchent sur leurs modalités d’organisation et de fonctionnement. Deux dimensions doivent à cet égard être abordées conjointement, à savoir les rapports de travail et les rapports de consommation. Au départ, la création des CLSC était caractérisée par une triple alliance entre direction, salariés et usagers. De plus, les CLSC exprimaient à cette époque autant un refus de la consommation dépendante qu’une critique des rapports de travail autoritaires. La remise en question du compromis initial s’est effectuée à travers la mise en place, sur le plan du travail, de rapports quasi fordistes (en remplacement des rapports socio-politiques) et, sur le plan de la consommation, de rapports catégoriels qui se sont substitués aux rapports socio-communautaires de consommation. L’avenir des CLSC se joue autour des deux dimensions.
Abstract
The establishment in Québec in the 1970’s of Centres locaux de services communautaires (CLSCs) was the result of a social crisis that existed at the time, but which has evolved into a different set of conditions today. The issues at stake in the CLSCs of today are presented by the authors through an examination of the structure and functioning of these institutions. Two dimensions—work relations and consumer (client)/institution relations—are examined side-by-side.
At their origin, CLSCs were characterized by a three-way alliance between administration, staff and users. Client dependency and authoritarian work relations were rejected as models. This initial balance was thrown into jeopardy when a Fordist work model was adopted to replace the original sociopolitical model. On the consumer level, categorization began to replace the sociocommunity model in provision of social services. The future of the CLSC as an institution will be determined around these issues.
Local Community Service Centers. The abbreviation « CLSC » is commonly used in Québec in English as well as French milieux.
Action publique et solidarité civile : le cas du maintien à domicile des personnes âgées
Bruno Jobert
|
Résumé
L’auteur présente les conclusions d’une recherche portant sur les politiques de maintien à domicile pour les personnes âgées. L’objectif de la recherche était de comprendre l’agencement des relations entre solidarité publique, marché et solidarité primaire. La recherche a été effectuée à partir d’entretiens qualitatifs auprès de personnes âgées de deux quartiers de l’agglomération grenobloise. Contrairement à la vision largement répandue d’une opposition consacrée entre État et société civile, la recherche montre plutôt ici que l’action publique n’apparaît pas toujours et par nature comme l’ennemi de la solidarité privée. Mais il ressort clairement que l’entourage joue un rôle essentiel dans le maintien des personnes âgées à domicile. Et cette réalité devient particulièrement difficile à gérer lorsque nous sommes en présence de cas de dépendance sévère ou de sénilité. À cet égard, il faut parler de déficit grave de l’action publique.
Abstract
The author presents the findings of research done on policies of home care for the elderly. The goal of the research was to understand the relationship between community solidarity, the market and primary solidarity. The study consisted of qualitative interviews with senior citizens in two neighborhoods of Grenoble.
The research showed that contrary to the widely held view that the dynamic between the State and civil society is adversarial, government action was not perceived either in nature or with any frequency to be contrary to the interest of primary solidarity.
But it clearly emerged that the entourage plays an essential role in maintaining the elderly in a home environment. And this reality becomes particularly difficult to administer when it involves severe cases of dependency or senility. In this respect we see a serious lack in government social action.
Un cas de force majeure : le développement des mesures d’assistance publique à Montréal au tournant du siècle
Jean-Marie Fecteau
|
Résumé
L’émergence d’une politique systématique d’assistance aux populations démunies au niveau municipal est très peu documentée au Québec. On trouvera ici une brève analyse du phénomène dans le cas de Montréal au tournant du siècle. L’auteur tente de montrer que la problématique d’assistance définie au dix-neuvième siècle et la place qui y est assignée aux villes sont peu à peu « dépassées » par l’ampleur du phénomène de la misère en milieu urbain. La politique d’assistance mise en place recèle des limites qui en font moins un prodrome de l’État-providence qu’une forme hybride de charité publique dont l’apogée sera la loi québécoise sur l’assistance publique de 1921.
Abstract
The emergence of a systematic policy of assistance for the underprivileged at the municipal level has hardly been documented in Quebec. This article gives a brief analysis of the phenomenon in Montreal at the turn of the century. The objective is to show how the conception of assistance implemented in the 19th century, and the place given to cities in that regard, gradually became outdated by the very scope of poverty in urban settings. However, the assistance policy established contains some limitations which make it less a precursor of the welfare state than a hybrid form of public charity which reached its apogee with the 1921 Quebec Public Charities Act.
Les relations de guichet : interactions de classes et classements sociaux
Yasmine Siblot
|
Résumé
Cet article examine la pertinence d’une analyse en termes d’interactions de classes pour l’étude des relations entre des agents d’institutions publiques et la population d’un quartier populaire, à partir d’une enquête menée dans les permanences d’un centre social. La caractérisation des positions sociales relatives est complexe, du fait de la disparité des trajectoires des agents, et de la différenciation interne à la population. Une gamme de relations, allant de l’entraide à la mise à distance, s’instaure ainsi entre les employées et leur public. Des processus de cristallisation de positionnements sociaux se déroulent néanmoins au sein des permanences, pour les agents comme pour les habitants. En particulier, la distance entre employées et habitants les plus précaires s’accuse, confortant la perception des clivages entre fractions de la population.
Abstract
This article assesses the utility of a class analysis for the study of relations between the personnel of public institutions and the population of a popular neighbourhood. The data come from a study of a social centre. Characterisation of social positions is complicated, given the variety of backgrounds of the personnel and the internal differences in the population served. A range, from supportive to distanced, characterise relations between workers and their public. Processes of stabilisation of social relations nonetheless do take place in these offices, both for the personnel and the population served. In particular, there is a clear distancing between the most precarious of the population and the workers, one which reinforces the perception that there are cleavages among fractions of the population.
Les fondations et la « nouvelle philanthropie » : un changement de paradigmes scientifiques et politiques
Élise Ducharme et Frédéric Lesemann
|
Résumé
Les fondations de la « nouvelle philanthropie » portent un regard critique sur l’organisation sociale et sur l’action politique et tendent à imposer une nouvelle manière de gérer le social. Au Québec, la Fondation Lucie et André Chagnon s’inscrit dans la logique de ce mouvement. Les recherches effectuées à son sujet ont permis de faire ressortir quelques-uns des impacts de sa présence sur les acteurs du terrain de l’action sociale et communautaire. La situation constatée reflète une nouvelle logique d’action qui correspond à de nouveaux paradigmes que l’on retrouve à la fois dans le champ scientifique et dans le champ de la gouvernance, et qui concurrencent ceux sur lesquels reposent des années de pratiques de terrain.
Abstract
The foundations of the “new philanthropy” take a critical view of social organization and political action and tend to impose a new way of managing social issues. In Quebec, the Fondation Lucie et André Chagnon is typical of this movement. Research has revealed some of the impacts the foundation has had on groups working in the area of social and community action. The findings reflect a new logic of action that corresponds to new paradigms found in both science and governance, and that are competing with those on which years of practice in the field are based.
Thème 3 – Luttes sociales
Luttes sociales : présentation du thème
Pascale Dietrich et Pascale Dufour
Éducation populaire et pédagogie militante
Colette Humbert et Jean Merlo
|
Résumé
Toute éducation populaire n’est pas ipso facto libératrice des masses dominées et ne concourt pas à leur conscientisation.
Les conditions principales à réunir pour atteindre un tel objectif sont :
- de mieux définir ce que sont les « masses populaires » aux niveaux économique, politique et idéologico-culturel pour préciser le contenu et la méthode d’une éducation libératrice : construction d’un nouveau savoir social à partir du vécu et des conditions de vie des masses populaires, savoir mis en rapport avec ce qui se passe à l’échelle nationale et internationale;
- de préciser le type de militants qui vont devenir animateurs-formateurs d’éducation populaire, leurs liens avec les organisations de lutte et leurs statut face aux masses populaires;
- de développer la confrontation et la critique entre les divers organismes de formation qui poursuivent des objectifs de pédagogie militante, afin de s’interroger réciproquement sur les discours idéologiques, les stratégies à long terme, les modalités d’action des uns et des autres en vue de parvenir à une plus grande efficacité dans la poursuite des objectifs d’une « authentique éducation populaire ».
Abstract
All popular education is not automatically liberating and does not necessarily increase the consciousness of the oppressed.
The conditions necessary to reach such an objective are:
- To more carefully define what we mean by the « oppressed masses » in economic, political, cultural and ideological terms in order to be able to clarify the content and method of a truly liberating educational process. This process must be based on a new social knowledge that springs from the daily life of the masses but at the same time in close interaction with what is happenig nationally and internationally.
- to clarify the type of militants that will become the new leaders of popular education. The relations with their organizations and the masses must be scrutinized.
- to encourage confrontation and criticism amongst the various organisations that are presently engaged in militant pedagogy in order to examine our ideological frameworks, our longterm strategies and the modalities of our actions. In this way, we can hope to become more effective in our attemps to build an « authentic popular education ».
Mouvements sociaux, mouvements post-politiques
Alberto Melucci
|
Résumé
Dans cet article, l’auteur s’efforce de saisir les mouvements sociaux qui parcourent les sociétés post-industrielles comme les signes d’une transformation profonde de la logique et des mécanismes qui guident nos sociétés. Il esquisse une interprétation de ces formes contemporaines d’action collective que constituent les mouvements « post-politiques » des jeunes, des femmes, des groupes nationaux et des communautés ethniques ainsi que les mobilisations écologiques.
Ces mouvements sont pour l’auteur « post-politiques », dans le sens où ils débordent complètement les cadres traditionnels d’organisation et de compréhension politiques des sociétés industrielles. Il n’est donc plus possible de les saisir correctement à travers des schèmes d’analyse qui sont marqués historiquement par les formes politiques que ces sociétés ont produites.
Peut-on même parler de « mouvements » ? Il s’agit plutôt d’espaces de rassemblement, de réseaux diffus de groupes, de points de rencontre qui diffèrent profondément de l’acteur collectif organisé politiquement. Doit-on qualifier ces phénomènes de désagrégation ? Nous nous trouvons plutôt en face d’un changement du modèle et de la forme de rassemblement de l’acteur collectif qui pose le problème du rapport entre les mouvements et les systèmes de représentation et d’organisation politique.
Abstract
The author analyses various social movements characteristic of post-industrial societies as indications of a profund transformation of the logic and the mechanisms underlying contemporary society. He outlines his interpretation of the collective action proposed by the new « post-political » movements: youth, women, national minorities and ethnic groups as well as ecology groups.
These movements are considered as « post-political » in the sense that they do not fit into traditional analyses of political organization and action in industrial societies. The modes of analysis appropriate to political action in industrial societies may constitute more of a hindrance than a help to our understanding of these movements.
One may well ask whether the term « movements » is the most appropriate. Perhaps it would be more useful to speak in terms of « focal points » or informal networks. It would seem, in any case, that our analysis must be radically different than in the case of the politically organized collective actor. Should these new forms of organization and action be seen simply as a breakdown of traditional behaviour? Or would it be more useful to say that we are facing a new model of organization of the collective actor which poses the problem of the relationship between these movements and the traditional systems of political representation and organization.
Le conflit des deux modernités et la question de la disparition des solidarités
Ulrich Beck
|
Résumé
Dans ce texte synthétique reprenant deux courts chapitres publiés en allemand en 1995, Ulrich Beck présente quelques-uns des concepts essentiels sur lesquels il appuie sa lecture de la société contemporaine et, en particulier, la notion de « modernisation reflexive », qu’il partage avec Anthony Giddens. Selon Beck, les trente dernières années ont été marquées par un processus continu de détraditionalisation. Avec ce processus, plusieurs des clefs de voûte de la société industrielle se sont dissoutes : partage des rôles des sexes, famille nucléaire, classes sociales. Ces catégories qui permettaient d’orienter les trajectoires sociales et de définir les positions dans la société industrielle, mais aussi qui étaient relayées par les institutions, n’organisent plus les trajectoires individualisées. La biographie normalisée devient une biographie choisie. Nous vivons désormais dans une société sans classe, mais gorgée d’inégalités sociales, une société où s’érodent les fondements existentiels des institutions et des formes de consensus qui les ont portées. Ces transformations ont aussi des conséquences majeures pour les formes de mobilisation et d’expression politique. Beck aborde cette question dans un second temps, en évoquant la question des solidarités dans les sociétés modernes avancées.
Abstract
In this synthesis of two brief chapters originally published in German in 1995, Ulrich Beck presents some of the concepts that are crucial to his analysis of contemporary society, particularly the notion of « reflexive modernization, » which he shares with Anthony Giddens. In Beck’s view, the past thirty years have been marked by a continuing process of « detraditionalization. » This has led to the disintegration of several of the cornerstones of industrial society : gender roles, the nuclear family, social classes, etc. These categories, which had helped people to orient their social trajectories and define their positions in industrial society, and which had also been conveyed by institutions, have ceased to guide today’s individualized life courses, which are no longer standardized, but chosen. In today’s « classless » society, social inequalities are nonetheless rampant, and the existential foundations of institutions and the forms of consensus which had engendered them are breaking down. These changes have also had a major impact on forms of mobilization and political expression. Beck examines this aspect in the second part of his text as he looks at the question of solidarity in societies in the late modern age.
Cosmopolites enracinés et militants transnationaux
Sydney Tarrow
|
Résumé
Les cosmopolites enracinés forment aujourd’hui une partie importante des groupes et des individus impliqués dans le militantisme social. S’appuyant sur les changements technologiques, l’intégration économique et les réseaux culturels, ce phénomène trouve son expression la plus frappante dans la mobilisation de jeunes militants à des manifestations organisées hors de leur propre pays, ce qu’on nomme le militantisme transnational. À partir de la définition relationnelle (et non cognitive) du cosmopolitisme, plusieurs figures du « cosmopolitisme enraciné » sont présentées, qui correspondent à autant de formes distinctes de militantisme transnational.
Abstract
A large segment of those individuals and groups involved in social activism is composed of rooted cosmopolitans. Following technological changes, economic integration and cultural networks this phenomenon is most apparent in transnational activism, which is the mobilisation of young activists for actions outside their own country. Starting from a relational rather than discursive definition of cosmopolitanism, several versions of the rooted cosmopolitan, corresponding to particular types of transnational activism, are described.
Radicaliser l’action collective : portrait de l’option libertaire au Québec
Rachel Sarrasin, Anna Kruzynski, Sandra Jeppesen et Émilie Breton
|
Résumé
La mobilisation contre la mondialisation des échanges économiques au tournant du xxie siècle et, au Québec en particulier, dans le cadre du Sommet des Amériques en 2001 a donné l’impulsion à un mode d’engagement politique qui prend forme à l’extérieur des voies institutionnalisées de l’action partisane et du milieu communautaire. S’inspirant de la pensée politique anarchiste, les initiatives en apparence fragmentées qui s’inscrivent dans cette option libertaire forment aujourd’hui dans la province une communauté de mouvement social antiautoritaire. L’article a pour objectif de tracer un portrait empirique de cette communauté en dégageant la culture politique et l’interface organisationnelle qui relient les différents acteurs qui la composent. Mobilisés sur une variété de thématiques de lutte, ces acteurs antiautoritaires portent l’embryon d’un projet politique alternatif fondé sur la promotion de l’autonomie collective. Ce faisant, la communauté antiautoritaire porte les germes d’une façon novatrice de se réapproprier le politique par la pratique de la préfiguration, contribuant à la radicalisation du répertoire des formes d’engagement disponibles dans le paysage social et politique québécois.
Abstract
The mobilization against the globalization of trade at the turn of the 21st century and, in Quebec in particular, at the 2001 Summit of the Americas, gave a boost to a form of political engagement that took shape outside the institutionalized paths of partisan and community-based action. Taking their inspiration from anarchist political thought, the seemingly fragmented activist initiatives that are part of this libertarian current now form an antiauthoritarian social movement in the province. The goal of this paper is to offer an empirical picture of this antiauthoritarian community by highlighting the political culture and organizational interface that tie together the community’s various actors. Focused on a variety of different struggles, these antiauthoritarian activists are the standard-bearers of an alternative political project based on the promotion of collective autonomy. The community carries within it the seeds of an innovative way to reappropriate politics through the practice of prefiguration, thus contributing to the radicalization of the various forms of engagement available on the Quebec social and political landscape.
Thème 4 – Mobilités, identités et frontières
Mobilités, identités et frontières : présentation du thème
Francis Kessler et Xavier Leloup
Phénomène d’acculturation et santé du migrant
Jacqueline Alfatli et Nazim Alfatli
|
Résumé
Le migrant traduit dans son corps les difficultés de son acculturation. C’est à partir de cette compréhension de la dimension culturelle des maladies du migrant que l’équipe médicale peut intervenir. La Maison médicale de GRACE-HOLLOGNE, quartier populaire de Liège composé à 40 % d’habitants immigrés vise à intégrer ceux-ci dans un processus de prise en charge collective, à l’intérieur du quartier et d’une communauté. Autogestion, conseils de patients, travail de groupe, approche culturelle de la maladie physique et mentale caractérisent le fonctionnement de cette maison médicale.
Abstract
The difficulties of acculturation express themselves in the body of the migrant worker. An understanding of the cultural dimension of health problems of migrant workers is essential if medical care is to be effective. The Medical Center of Grâce-Hollogne, situated in a largely working-class and immigrant neighbourhood in Liège, seeks to integrate migrant workers into a process of collective control of the neighbourhood. The medical center is run by the personnel in conjonction with Patient Commitees and attempts to develop a cultural and collective approach to physical and mental problems.
La ville continue. Montréal et l’expérience transculturelle de Vice Versa
Lamberto Tassinari
|
Résumé
Vice Versa est un magazine original lancé au Québec en 1983 par un groupe d’intellectuels italiens. Ce projet de magazine transculturel (plutôt qu’ethnique) est porteur de tous les dilemmes, frustrations et espoirs des auteurs qui y participent et de leur condition d’immigrés, mais surtout il véhicule, à travers une critique de l’ethnicité, l’ambition d’un nouvel humanisme. La nouveauté de cet humanisme découle de l’idée du déclin des cultures majoritaires, et Montréal, par ses caractéristiques, pourrait en être le creuset privilégié.
Abstract
Vice Versa is an original magazine started in Quebec in 1983 by a group of Italian intellectuals. This transculturally-(rather than ethnically) oriented magazine project reveals all the dilemmas, frustrations and hopes of the participant authors in their condition as immigrants, yet primarily endeavours to convey a new vision of humanism through its critique of ethnicity. Its new type of humanism derives from its concept of the decline of majority cultures and the idea that the special nature of Montreal could make this city a particularly conducive melting-pot for such a vision.
Élites et leaders ethniques : entre mobilité sociale et structuration communautaire
Marco Martiniello
|
Résumé
Pour rendre compte de la situation post-migratoire en Europe continentale, l’auteur, ayant distingué entre catégorie ethnique et communauté ethnique et entre élites ethniques et leader ethnique, trace le bilan et les enjeux théoriques de l’étude des élites et du leadership ethniques dans la même région du monde. Une critique de la version la plus courante de la thèse de l’ethnicisation des rapports sociaux est présentée et une théorisation à la fois alternative et complémentaire est exposée. Cette théorisation met en évidence les relations de pouvoir et d’impuissance qui se nouent entre la polity de la société d’immigration et les communautés ethniques d’origine immigrée. La position et le rôle des élites et des leaders ethniques dans ces relations inégalitaires font l’objet d’une attention particulière. Dans la troisième partie de l’article, l’exemple de la collectivité belge francophone d’origine italienne sert à illustrer les propositions théoriques avancées.
Abstract
To assess the post-migratory situation in continental Europe, the author distinguishes between ethnic category and ethnic community, and between ethnic elite and ethnic leader, and then describes the situation and theoretical issues of the study of ethnic elites and leadership in that part of the world. A critique of the most popular version of the thesis of the ethnicization of social relationships is presented, along with a theoretical framework that is both alternative and complementary. The theory highlights the relationships of power and powerlessness formed between the polity of the host society and ethnic communities of immigrant origin, with special attention to the status and roles of ethnic elites and leaders in these unequal relationships. In the third section of the article, the example of the French-speaking Belgian community of Italian origin serves to illustrate the proposed theory.
Entre l’héritage colonial et la recherche d’autonomie politique : les peuples autochtones dans la tourmente des réformes de l’État-providence. Une comparaison de l’expérience australienne, américaine et canadienne
Martin Papillon
|
Résumé
Longtemps exclus, puis victimes de politiques d’assimilation forcée, les peuples autochtones remettent aujourd’hui en question les conditions de leur appartenance et de leur participation au régime de citoyenneté des États issus de la colonisation européenne. Le processus de restructuration de l’État-providence pourrait influencer la dynamique des revendications identitaires autochtones, en modifiant les paramètres de la citoyenneté sociale et la relation des peuples autochtones avec l’État. On tend aujourd’hui, d’une part, à l’intégration programmatique accompagnée de mesures ciblées et, d’autre part, à une plus grande autonomie locale dans la gestion de ces programmes. Le régime de citoyenneté d’après-guerre favorisait plutôt une uniformisation du rapport entre les citoyens et l’État, et donc posait en contradiction l’intégration à ce régime et le maintien d’un régime statutaire distinct pour les autochtones. Le modèle actuel peut ainsi paraître moins réfractaire à la multiplicité et à la différenciation.
Abstract
Long excluded, then victims of forced assimilation, aboriginal peoples are now evaluating the conditions of their belonging to and participation in citizenship regimes in these three former colonies. The processes of welfare state restructuring may influence the dynamic of identity claims of aboriginal peoples, by modifying the parameters of social citizenship and the relations that aboriginal peoples have with the state. These reforms lean, on the one hand, towards integrated policy with targeted programmes and, on the other hand, towards greater local autonomy in programme management. The post-war citizenship regime in contrast favoured a uniform relationship between citizens and the state, thereby setting up a contradiction between the terms of the citizenship regime and maintenance of a distinct legal regime for aboriginal peoples. The current model seems less likely to constitute a block to recognition of multiplicity and differentiation.
L’organisation au service des droits des travailleurs migrants : le militantisme transnational à Singapour et en Malaisie
Lenore Lyons
|
Résumé
La mondialisation marque un point charnière dans l’action des militants féministes et des organisations non gouvernementales. À la faveur d’une participation à des réseaux de lobbying transnationaux et d’alliances avec des organisations non gouvernementales internationales, des organisations féministes et des organisations vouées à la défense des droits des femmes, locales et nationales, se sont converties à de nouvelles formes de militantisme transnational. Cependant, il est une question qui n’a que très peu retenu l’attention des chercheurs dans le domaine de l’organisation féministe transnationale : c’est celle du lien entre le militantisme transnational et les théories qui sous-tendent les féminismes transnationaux. Bien que ceux-ci formulent une critique radicale de la mondialisation, à la fois antiraciste et anticapitaliste, peu de chercheurs se sont penchés sur la façon dont les féminismes transnationaux se transposent en pratiques militantes. En étudiant deux cas d’organisations vouées à la défense des droits des travailleuses migrantes, à Singapour et en Malaisie, le présent article examine les multiples sens du terme « militantisme féministe transnational ». En faisant la distinction entre le concept d’organisation transnationale d’une part, et celui de cadre de référence transnational de l’autre, le présent article vise à clarifier les différents concepts associés aux féminismes transnationaux.
Abstract
Globalization provides a key reference point in the work of feminist activists and non-government organizations. Through their involvement in transnational advocacy networks and alliances with international non-governmental organizations, locally and nationally-based women’s rights and feminist organizations are engaged in new forms of transnational activism. One issue that has received relatively little attention, however, is the link between cross-border activism and theories of transnational feminisms. Although the latter utilizes a radical anti-racist, anti-capitalist critique of globalization, there is little discussion about how transnational feminisms are translated into activist practices. Using case studies of two organizations working to address the rights of female migrant workers in Singapore and Malaysia, this article examines the multiple meanings attached to the term “transnational feminist activism”. By making a conceptual distinction between cross-border organizing on the one hand and a transnational frame of reference on the other, this article calls for greater conceptual clarity regarding the meanings associated with transnational feminisms.
Les réseaux familiaux transnationaux supports aux initiatives en matière de santé chez les Gitans catalans
Lamia Missaoui
|
Résumé
L’article relate comment les Gitans catalans sont à même de développer des initiatives en matière de santé. Alors même que les services médico-sociaux signalent unanimement leur grande difficulté à gérer leurs missions auprès de ces populations et que les comportements collectifs tsiganes en matière de consultation et de suivi médical sont désignés comme anarchiques, ignorants de l’organisation territorialisée des institutions de santé, alors même que le sida, lié à de fortes consommations d’héroïne injectée, décimerait des clans gitans. La cartographie des déplacements pour soins suggère que, si les traditionnels nomadismes ont disparu, de vastes réseaux territoriaux transfrontaliers sont toujours activés et permettent des mobilisations inconnues parmi les autres populations.
Abstract
This paper shows how Catalan Gypsies succeed in developing health-related initiatives at a time when health care and social services are all unanimously admitting that they find it very hard to fulfil their missions with these groups. Gypsy behaviour collectively, with respect to medical consultation and follow-up, has been described as anarchic and ignoring the territorial organization of health-care institutions, at the same time as AIDS, associated with heavy injection drug use, is reportedly decimating Gypsy clans. A mapping of travel undertaken to access health care suggests that, while traditional nomadism may have died out, extensive transborder territorial networks are still being activated, enabling types of mobilization unknown among other populations.